dimanche 15 mai 2011

La vague de constructions illégales, un casse-tête pour l'État

La vague de constructions illégales, un casse-tête pour l'État
15/05/2011
Des hommes politiques et autres personnalités sont largement soupçonnés  d'avoir légalisé des constructions bâties de manière anarchique dans le  passé, à coups de pots-de-vin, de pressions et de trafic d'influence.
Des hommes politiques et autres personnalités sont largement soupçonnés d'avoir légalisé des constructions bâties de manière anarchique dans le passé, à coups de pots-de-vin, de pressions et de trafic d'influence.
Social
Depuis plusieurs semaines, les constructions illégales poussent comme des champignons sur des terrains domaniaux, posant un danger public et un véritable casse-tête social pour l'État, qui a ordonné leur destruction.
Le président de la commission des Travaux publics au Parlement, Mohammad Kabbani, souligne surtout le danger posé à la navigation aérienne par des habitations illégales de plusieurs étages construites à proximité de l'aéroport international de Beyrouth.
Les autorités ont lancé une campagne pour raser les bâtisses illégales concentrées dans des zones densément peuplées de la banlieue sud de Beyrouth et du sud du pays, deux bastions du Hezbollah.
"L'État ne s'en prend qu'aux pauvres!" lâche, furieuse, Fatima Ghazali, 46 ans, devant les débris d'une maison qu'elle faisait construire sur un terrain public à Adloun, au sud de Beyrouth.
Mais dans un pays où le laxisme est roi, ces constructions viennent s'ajouter aux milliers d'autres édifiées à la faveur de l'anarchie de la guerre civile (1975-1990).
Elles interviennent au moment où le pays est sans gouvernement depuis janvier, et que les institutions étatiques semblent être entrées dans une sorte de "coma".
"Les contrevenants ont profité du vide politique et du fait que le gouvernement chargé des affaires courantes n'est pas très efficace", affirme Mohammad Kabbani.
Il souligne le danger posé à l'aviation par des constructions illégales de plusieurs étages, ajoutant que cela menaçait la sécurité de l'aéroport qui pourrait être exposé à des "sanctions internationales".
"Près de la piste 17 (ouest), les constructions illégales se limitaient à un seul étage et soudain on voit deux et trois bâtisses ayant poussé à sept mètres de hauteur ces deux derniers mois", affirme-t-il.
Chaque fois que les forces de l'ordre tentent de stopper un chantier, des accrochages avec les habitants s'ensuivent. Le 21 avril, il y a eu deux morts à Tyr (sud).
Le Hezbollah, accusé de fermer l'oeil sur ces projets, a démenti et dénoncé "toute violation de la loi".
D'ailleurs, les choses semblent échapper au contrôle des partis aussi influents qu'ils soient.
"Je reconstruirai ce qu'ils ont détruit. C'est ma propriété, pas celle de Bahia Hariri, de Nabih Berry ou Hassan Nasrallah", lance sans ambages Leila Khazen, 40 ans.
"Le Hezbollah et Amal font pression pour que l'on arrête les constructions, mais les gens ne vont pas les écouter", assure un constructeur de 43 ans à Tyr.
"Pourquoi les politiciens ont-ils le droit de grignoter des milliers d'hectares de terrains domaniaux, alors que c'est un scandale quand les pauvres construisent un appartement de deux chambres?" s'insurge-t-il, au moment où des ouvriers s'affairaient autour de lui comme des abeilles dans une ruche.
Des hommes politiques et autres personnalités sont largement soupçonnés d'avoir légalisé des constructions bâties de manière anarchique dans le passé, à coups de pots-de-vin, de pressions et de trafic d'influence.
"Il y a 1 296 propriétés maritimes illégales, contre 64 construites dans les normes", selon M. Kabbani.
Mais pour les classes défavorisées, une construction illégale est devenue un "droit".
"Mes trois fils sont des ouvriers journaliers qui touchent 10 dollars par jour. Comment voulez-vous qu'ils achètent des appartements qui se vendent à des centaines de milliers de dollars?" s'écrie Fatima Ghazali.
En plus de l'aspect social, beaucoup s'inquiètent de l'impact sur la sécurité et l'environnement.
"Ces constructions sont un danger public car elles ne respectent aucun critère", affirme le président du syndicat des ingénieurs, Elie Basaybes. "Ce sont des sortes de cercueils: elles s'effondreront sur la tête de leurs habitants à la moindre catastrophe naturelle".


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